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Artistes et modèles

Baudelaire, Leonard Cohen et Alicia Alonso, légendaire danseuse classique cubaine, invités prestigieux de la sélection BD de la semaine.

Quelques planches de la BD "Mademoiselle Baudelaire".
Quelques planches de la BD "Mademoiselle Baudelaire".

Mademoiselle Baudelaire

Admirateur de son œuvre et familier depuis longtemps de l'univers du poète dandy, le scénariste et dessinateur Yslaire nous plonge ici au cœur de la relation passionnelle entre Charles Baudelaire et sa maîtresse Jeanne Duval, avec, en toile de fond, l'effervescence du Paris artistique du XIXe siècle. D'origine créole, surnommée la «Vénus noire», Jeanne Duval demeure néanmoins un mystère. D'elle, on ne sait presque rien, ni son vrai nom, ni sa date de naissance, ni sa date de décès. Restent quelques témoignages, des portraits dessinés par Baudelaire lui-même, une photo de Nadar non authentifiée, sans oublier les poèmes qu'elle lui a inspirés. C'est pourtant celle que le poète a le plus aimée et le plus maudite, que le dessinateur a choisie pour revisiter la matière sulfureuse et autobiographique des Fleurs du mal. D'une beauté radicale en osmose avec le romantisme noir de Baudelaire, cette BD sidérante offre de sublimes dessins oscillant entre onirisme poétique et réalisme cru tandis que la trame narrative brosse avec finesse le portrait du poète et de Jeanne, couple détonant dans un siècle misogyne et raciste.

Aire libre.

Leonard Cohen

Cette biographie musicale de l’un des plus grands artistes de ces cinquante dernières années s'ouvre à Los Angeles, le 7 novembre 2016 alors que Léonard Cohen est sur le point de mourir, se plongeant dans les souvenirs d'une vie riche en rencontres et créations. Construit en flash-backs, le scénario de Philippe Girard, également auteur des dessins, oscille entre la sphère publique et privée d'un homme qui aura traversé la seconde moitié du XXe siècle avec élégance, marquant plusieurs générations par la douceur mélancolique de ses chansons et le timbre chaud de sa voix. Le récit s'attarde ainsi sur la création de compositions cultes comme «Hallelujah» ou «Suzanne» ou ses rencontres avec Janis Joplin, Lou Reed ou Phil Spector... Mais il revient aussi sur les femmes qu'il a aimées - et qui furent une inaltérable source d'inspiration -, sur son rapport étroit à la religion juive, sa famille, ou encore sur sa profonde solitude. Une BD indispensable pour les afficionados du chanteur et musicien canadien.

Casterman.

Alicia

En 2015, la journaliste et cinéaste Eileen Hofer signait un documentaire sur la danseuse cubaine Alicia Alonso, véritable légende dans son pays. Cette magnifique BD entremêlant réalité historique et fiction est née de sa rencontre avec la dessinatrice Mayalen Goust. L'histoire oscille ainsi entre 1959 et 2011 et croise les destins de trois femmes de La Havane. Celui d'Amanda, jeune ballerine en devenir dans le Cuba de la dernière décennie. Celui de Manuela, mère célibataire, qui n'aura fait qu'effleurer son rêve de danseuse classique et enfin celui d'Alicia Alonso, dont on suit l'ascension vers la gloire jusqu'à devenir prima ballerina assoluta au parcours exceptionnel, devenant alors un objet de propagande du régime castriste. Dans un pays où règnent le système D et la solidarité, tout autant que la dénonciation et le marché noir, l'histoire de la démocratisation de la danse classique rime étrangement avec l'avènement au pouvoir de Fidel Castro. Un récit à la fois historique, poétique et politique magnifié par le graphisme élégant et épuré de Mayalen Goust aux tons pastels.

Rue de Sèvres.