Chanvre textile : une filière naissante dans les Hauts-de-France
Le GIE Chanvre textile des Hauts-de-France a récolté sa première parcelle le 25 août à Moliens, dans l'Oise. Un moment important pour une filière naissante dans la région qui attise les convoitises.
Le 25 août dernier à Moliens, tout le petit monde du lin textile était réuni pour assister à la première récolte de chanvre du GIE Chanvre textile des Hauts-de-France. Celui regroupe les coopératives Lin 2000 (Grandvilliers - Oise), Calira (Martainneville - Somme), L.A. Linière (Bourbourg - Nord) et Opalin (Le Parcq – Pas-de-Calais), qui s'intéressent grandement au chanvre. En effet, cette culture est testée comme alternative au lin, plante vulnérable à la sécheresse. «Faire du lin, ça devient de plus en plus compliqué», résume Sébastien Jumel, président de Calira, reprenant un constat largement partagé dans la région.
Une machine qui change la donne
Plante couvrante, stockant beaucoup de carbone, peu exigeante et nécessitant peu de traitements chimiques, le chanvre se présente comme une alternative idéale. «Mais jusqu'à maintenant il n'existait pas la machine pour récolter le chanvre à destination de la filière textile», explique Guillaume Vandenberghe, chef de projet chez Lin 2000.
Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Le constructeur belge Hyler vient en effet de concevoir et commercialiser une machine capable de paralléliser les tiges de chanvre, puis de couper la nappe en deux. De quoi éviter des surinvestissements en matériel : les retourneuses et enrouleuses à lin pourront être utilisées pour la récolte... Quant aux adaptations sur les lignes de teillage – qui restent encore à déterminer précisément – elles devraient être mineures.
Aussi les six exemplaires mis sur le marché fin 2022 par Hyler, ont très vite été vendus. Deux ont atterri dans les Hauts-de-France, au GIE Chanvre textile et chez un groupe de liniculteurs privés. «Il nous faut aller vite pour prendre la place sur le marché, argumente Vincent Boche, président du GIE. Avec l'objectif de dégager une valeur ajoutée identique à celle du lin.»
Aller vite pour être les premiers
C'est d'ailleurs ce besoin d'aller vite qui a conduit les coopératives linières de la région à s'associer. Quatre-vingt-dix hectares ont été semés cette année, aux quatre coins de la région, pour tester la culture dans différents contextes pédoclimatiques et différentes conditions de culture. «On va collecter beaucoup d'informations en peu de temps, et on progressera beaucoup plus vite», poursuit Vincent Boche.
La phase de test ne devrait pas durer plus de deux ou trois campagnes, tant le temps presse pour se positionner sur ce marché. Tous les pays producteurs de lin textile s'y intéressent de près. «On a voulu aller vite pour prendre la main, y compris par rapport à d'autres régions», souffle Marie-Sophie Lesne, vice-présidente des Hauts-de-France, un œil tourné vers la Normandie. «On sera les premiers, parce qu'on est les meilleurs», sourit Nicolas Defransure, directeur de Lin 2000.
Dans cette orientation stratégique de la filière textile régionale, le coût de la machine, 450 000 euros, en deviendrait presque secondaire. Néanmoins, Vincent Boche l'affirme : «les participations de la Région et de l'Agence de l'eau [ndlr, de 134 000 euros chacune] ont été déterminantes pour nous.» Une fois teillé, le chanvre produira de la fibre textile, mais aussi, comme le lin, des étoupes dont la valorisation reste encore à déterminer. Les anas (les résidus), peuvent, quant à eux, être incorporés par exemple dans le béton de chanvre.