Objectif Zéro Artificialisation Nette
Les dispositions adoptées pour aménager le dispositif
Compté à part des grands projets d’intérêt national, garantie minimale d’un hectare pour toutes les communes, instance régionale de concertation… Retour sur les principaux aménagements votés par le Parlement cet été pour faciliter la mise en œuvre de l’objectif «zéro artificialisation nette».
Adoptée
juste avant les vacances parlementaires et deux mois avant les
élections sénatoriales, la
loi du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des
objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à
renforcer l’accompagnement des élus locaux a été âprement
négociée entre les parlementaires, les élus locaux et le
gouvernement. Elle est issue de la proposition de loi visant à
«faciliter la mise en œuvre des objectifs de zéro
artificialisation nette des sols au cœur des territoires»,
déposée fin 2022, par des sénateurs.
Un sujet très sensible pour les territoires
Le
«zéro artificialisation nette» (ZAN) est l’un
des objectifs inscrits dans la loi Climat et Résilience du 22 août
2021. Pour lutter contre l’étalement urbain, la loi exige de
réduire de moitié le rythme d’artificialisation des sols entre
2021 et 2031 par rapport à la décennie précédente et d’atteindre
«zéro artificialisation nette» d’ici 2050.
Issu de la Convention citoyenne pour le climat, le principe consiste
à faire en sorte qu’à terme toute surface prise sur des espaces
agricoles et naturels soit compensée par une superficie équivalente
rendue à la nature.
Un objectif qui inquiète beaucoup les élus
locaux, et notamment les petites communes, qui craignent de ne plus
pouvoir construire sur leur territoire. Cet objectif de densification
vient, en effet, imposer de fortes contraintes à l’extension de
zones pavillonnaires, commerciales et d’activité. Et les trois
décrets d’application pris après l’adoption de la loi pour
mettre en œuvre le ZAN ont déclenché une forte vague de
protestation.
Aménager les modalités d’application du ZAN
À
l’issue de nombreuses consultations d’associations d’élus et
de collectivités territoriales, des sénateurs ont alors pris
l’initiative de déposer une proposition de loi pour aménager
certaines des modalités d’application, afin de répondre aux
inquiétudes des élus locaux. Si le ministre de la Transition
écologique et de la Cohésion des territoires, Christophe Béchu, a
déclaré qu’il n’était pas opposé à des aménagements, il a
aussi fait savoir que le gouvernement n’entendait pas revenir sur
les objectifs fixés par la loi Climat.
Une position également
défendue par les députés de la majorité, les groupes écologistes
et les ONG impliquées dans la défense de l’environnement. De leur
côté, les associations d’élus ont notamment fait valoir que le
calendrier fixé par la loi était trop court, qu’il restait des
zones de flou et que les règles imposées étaient trop rigides et
ne prenaient pas assez en compte la diversité des territoires.
Les grands projets ne seront pas déduits de l’enveloppe des communes
Un
des grands points de désaccord concernait la comptabilisation des
superficies occupées par les grands projets d’envergure nationale,
souvent pilotés par l’État, tels que les constructions de
centrales nucléaires, de lignes à grande vitesse, de bases
militaires, de prisons... L’accord trouvé prévoit que ces projets
seront bien comptabilisés dans l’enveloppe globale de la
superficie autorisée à l’artificialisation d’ici 2031, mais
qu’ils ne seront pas intégrés dans les quotas accordés aux
communes et aux intercommunalités. Ils seront intégrés dans une
enveloppe de 10 000 hectares mutualisée entre les régions, et
ne seront pas décomptés au-delà de 10 000 hectares.
Un arrêté ministériel doit venir préciser la liste des grands
projets concernés.
Une commission de conciliation pourra être sollicitée par les
présidents de régions en cas de désaccord avec le gouvernement sur
l’intégration d’un grand projet dans la liste des projets
d’intérêt national mutualisés.
Un hectare minimum garanti pour toutes les communes
Autre
grand sujet de divergence : l’instauration d’un plancher de
droits, afin qu’aucune commune ne dispose d’une enveloppe
d’artificialisation inférieure à 1 hectare. Cet aménagement
destiné aux plus petites communes, et notamment aux communes
rurales, a finalement été adopté, alors que le ministre de la
Transition écologique était plutôt favorable à accorder cette
garantie sur 1% de la surface de la commune, et en fonction de
critères de densité.
Droit de préemption et possibilité de surseoir à statuer
Le
texte prévoit également la possibilité pour l’autorité
compétente pour délivrer les autorisations d'urbanisme de surseoir
à statuer sur la délivrance du permis si le projet peut
compromettre l’atteinte des objectifs fixés par le document
d'urbanisme, tant que ce dernier n’est pas révisé.
Ainsi que l’instauration d’un droit de préemption
permettant aux élus locaux de réserver le foncier présentant un
intérêt pour atteindre ces mêmes objectifs fixés. Cette dernière
disposition est notamment destinée à éviter les ruées sur les «friches».
Des instances régionales pour faciliter le dialogue territorial
Pour faciliter la concertation entre les élus locaux, départementaux, régionaux et les représentants des établissements publics et des EPCI, le texte prévoit la création, dans chaque région, d’une conférence régionale de gouvernance de la politique de réduction de l'artificialisation des sols. Entre le 1er janvier et le 30 juin 2027, chacune de ces nouvelles conférences régionales devra remettre au Parlement «un rapport faisant état du niveau de la consommation foncière et des résultats obtenus au regard des objectifs de réduction de l’artificialisation retenus au niveau régional». Et elles devront présenter un premier bilan de la réduction de l’artificialisation des sols avant le 1er janvier 2031, ainsi que des propositions pour atteindre l’objectif «zéro artificialisation nette» à l'horizon 2050.