Rencontre avec Marie-Ève Pennel, directrice générale de REG SAS
«J'ai toujours été cheffe d'entreprise»
À la tête de quatre sociétés et 130 salariés réparties entre Haubourdin, Maubeuge et Lens, Marie-Ève Pennel a l'entrepreneuriat - et en particulier la reprise d'entreprises industrielles -, dans le sang.
De mémoire de femme, Marie-Ève Pennel n'a «jamais eu de contrat employeur». «J'ai toujours été cheffe d'entreprise», constate-t-elle. À 21 ans, DEUG de sciences physique en poche, celle qui est désormais à la tête de REG SAS à Haubourdin - quatre entreprises et 130 salariés (voir encadré) -, se lance dans la création d'une société informatique de vente en ligne en région parisienne. «C'était en l'an 2000. Elle a très bien marché et existe toujours. Mais j'ai arrêté à 26 ans. J'étais peut-être trop jeune pour gérer toute cette pression et ce déploiement plus rapide que prévu», analyse-t-elle.
«J'ai commencé l'industrie et je n'ai pas pu m'en défaire»
Ensuite, «pour se mettre au vert», Marie-Ève Pennel monte dans le Nord, où elle «découvre quelque chose que les Parisiens et banlieusards ne connaissent pas, et qui s'appelle l'industrie. J'ai découvert ce monde qui est fabuleux parce que ce sont des gens qui ont les pieds sur Terre. Nous sommes dans le présent, dans les vraies valeurs de la vie. Pas dans une tour à La Défense à imaginer ce qu'est l'industrie. À ce moment-là, je voulais un emploi sans responsabilités… ça a duré trois mois ! Et puis j'en suis revenue à la situation d'avant, avec un peu plus d'âge, de recul, j'ai commencé l'industrie, et je n'ai pas pu m'en défaire. C'était chez Vannes Lefebvre, maintenant cela s'appelle REG Technology. C'est ici !», nous relate-t-elle, en effet, au siège haubourdinois de REG SAS.
Croissance externe
Après cette première entreprise, cogérée avec son époux Patrice Pennel, décision est prise de miser sur la croissance externe : «À deux sur une entreprise de 10 personnes nous nous marchions un peu sur les pieds et avons décidé de faire de la croissance externe. Nous avons racheté l'entreprise Ducroux, qui fait de la robinetterie également et nous avons fusionné les deux. Nous sommes alors passés à une trentaine de personnes», se remémore Marie-Ève Pennel.
En 2014, le couple rachète la Société hautmontoise de construction industrielle (SHCI), basée à Maubeuge, bientôt fusionnée avec d'autres «petites entreprises». Puis en 2016 arrive Airmat Technology, qui fabrique à Lens des solutions d'enroulage-déroulage pour des clients comme Coca-Cola et compte une trentaine de personnes. En 2019, reprise de deux entreprises, dont Woti, une filiale de robinetterie de Malbranque, injectée dans REG Technology. Enfin, en mai 2019, «la petite dernière», Chaumeca, qui fabrique des sécheurs d'air pour les usines.
«C'est une responsabilité de tous les instants»
À la question de savoir comment Marie-Ève Pennel gère au quotidien ses entreprises et quelles sont les éventuelles difficultés rencontrées au quotidien, celle-ci répond, précisant être opérationnelle sur les quatre structures - «cela inclut vérifier qu'il y a du café, la voiture en panne sur le parking, les RH… tout ce qui fait la vie d'une PME !» -, que «c'est un stress, mais un très bon stress». Et d'ajouter : «Nous avons sauvé beaucoup d'emplois. C'est une responsabilité de tous les instants. Nous devons trouver des solutions car ce n'est pas nous que cela impacte. Ce sont les 25 de l'entreprise, ou les 130 du groupe. J'aime bien ce sentiment de responsabilité. Je trouve que plus devraient l'avoir parce que c'est un élément positif dans le job», plaide-t-elle. Évoluer dans un milieu masculin ne lui fait pas peur, même s'il faut avoir «du caractère». Côté management, elle l'adapte au cas par cas, «à la personne qui est en face, à l'histoire de vie de chacun».
«Nos décisions permettent un maintien des savoir-faire»
La mère de famille, qui est également conseillère prud'homale, est passée par l'executive MBA du Centre de perfectionnement aux affaires (CPA) du Cepi et est membre de l'APM, va plus loin dans sa réflexion, estimant que «si en tant qu'industriels nous ne prenons pas notre avenir en main, la désindustrialisation globale sera de notre responsabilité. Nous devons nous battre tous les jours», pointe-t-elle. Avant d'ajouter : «J'ai beaucoup de plaisir à savoir qu'il y a des familles qui vivent grâce à l'industrie sur le territoire. Il mute, mais nous arrivons à conserver des gens qui ont la passion de ce secteur, les tourneurs, les fraiseurs, les soudeurs. Nos décisions permettent un maintien des savoir-faire, la création de plus d’emplois et que nous arrivions à faire revenir des gens à l'industrie. Si un jour quelqu'un me dit 'grâce à toi je suis allée dans l'industrie', alors là j'ai la récompense de ma vie !», sourit la cheffe d'entreprise.
Si elle avait un conseil à donner aux entrepreneur(e)s : «Ne pas rester seul. Et écouter son corps ! J'ai été opérée 14 fois dans ma vie, et je commence à me demander si ça n'a pas un lien avec mon rapport au travail...». Les projets à venir : «De nouvelles reprises, toujours dans la construction de biens à usage industriel. De l'industrie, toujours plus d'industrie !», se réjouit Marie-Ève Pennel.
REG SAS, un groupe et quatre entreprises
- REG Technology : entreprise de robinetterie industrielle basée à Haubourdin, issue de la fusion de Vannes Lefebvre, Miroux, Ducroux et de Woti, une filiale de Malbranque.
- Chaumeca Technology : société experte dans le domaine du traitement de l’air comprimé et des gaz type hydrogène et CO2. Basée à Haubourdin.
- SHCI : la Société hautmontoise de construction industrielle (SHCI), basée à Louvroil près de Maubeuge, fournit l'équipement, les outillages et les moyens de manutention nécessaires pour réaliser des constructions mécaniques et ouvrages en chaudronnerie.
- Airmat Technology : implantée à Lens, Airmat est leader dans la conception et la fabrication de solutions d'enroulage et de déroulage via des arbres expansibles au service des process industriels.